Les chroniques littéraires

 

par JH ROCH

 

Entre 2009 et 2014,

JH ROCH a publié une chronique littéraire mensuelle pour

La Belle Vie 50+

RETOUR AU CENTRE D'ACHAT

Juin 2013

 

REFUGE À CHAPPAQUIDDICK

 

Par JH Roch

 

La saison du gril est enfin revenue et c’est le moment de varier le menu, d’essayer de nouvelles combinaisons de saveurs, de surprendre le palais de nos invités, d’explorer les viandes et les fruits de mer, les légumes et les baies qui ne nous sont offerts qu’à quelques précieux moments de l’été.

 

Le roman de Raichlen, un apéro, le barbecue qui grésille tout doucement sous votre surveillance, voilà le trio de la belle saison 2013.

En tant qu’auteure, je puis vous dire qu’il est plaisant d’écrire le bonheur des personnages tandis que la rédaction des malheurs est plus stressante (mais non moins plaisante !).  En tant que lectrice,  je puis vous dire qu’il est rare de lire le bonheur décrit avec un talent tel qu’il captive votre attention.

 

C’est le cas pour ce roman où le bonheur passe, entre autres, par une bonne table.

 

Le sujet n’est pourtant pas léger.  Claire  est en convalescence chez des amis fortunés sur l’île de Chappaquidick.  Lorsqu’elle a appris la nouvelle de son cancer et qu’elle l’a révélée à son mari, celui-ci (par un méchant hasard) avait choisi ce jour pour lui annoncer qu’il la quittait pour une autre femme.  La chimio a réussi à guérir le cancer physique, mais le cancer moral de cette trahison est encore bien vif.

 

Sur cette île, un ermite a organisé sa vie depuis une quinzaine d’année.  Barbu, vêtu de guenilles rapiécées, bouche fermée et yeux baissés, il passe comme une ombre et se fond dans le décor. Personne ne sait son nom, on ne sait même pas où il loge.

 

Claire se sent de mieux en mieux et elle peut ‘télétravailler’ sur le manuscrit d’un de ses auteurs de biographie, car Claire est à l’emploi d’un éditeur Newyorkais. Un jour elle se trouve suffisamment forte pour faire en vélo le trajet entre le ferry et la villa de ses amis. Malheureusement, au milieu de nulle part, elle fait une chute et en tombant son pauvre crâne à peine couvert d’un duvet heurte une pierre.  Elle s’évanouit.

 

Qui la retrouvera et s’occupera d’elle ?

 

 L’ermite bien sûr !  Il la portera dans ses bras.  Elle est inerte mais vivante.  Il la couvre de sa vieille parka malodorante et déchirée et la porte dans ses bras au capitaine du ferry qui s’assurera de la reconduire à terre où une ambulance l’attendra.

 

Claire se remet de sa commotion cérébrale et elle veut à tout prix retrouver son sauveur du milieu de nulle part pour le remercier.  On lui indique vaguement le marais où il est supposé vivre et elle ose s’aventurer par là pour lui remettre un sac avec sa parka, un mot d’invitation, et un pain aux canneberges de sa fabrication.  Comme elle est terrifiée par la sauvagerie du lieu jonché d’ossements d’animaux, elle abandonne son sac sur place et se sauve en courant.

 

Le lendemain, au pied de la boîte aux lettres de la luxueuse villa, son sac est revenu avec un pain aux noix délicieux.  Claire est un fin gourmet et elle adore cuisiner; ce cadeau est donc pour elle une agréable surprise.  Elle se décide à correspondre à nouveau avec l’ermite en y ajoutant sa confiture d’églantier.  Cette fois elle accroche le sac à une branche près du marais.  L’ermite lui répond avec une confiture de prunes de plage.

 

En tant que gourmet moi-même, je puis vous dire que je n’ai jamais réussi à produire une confiture d’églantier mangeable; par contre, ma confiture des prunes que j’avais cueillies de mes mains demandait un travail fastidieux et s’est avérée une vraie réussite.  Je suis donc en mesure d’apprécier cet échange de présents entre les deux protagonistes.

 

La suite ?  Vous vous en doutez bien, n’est-ce pas ?  Non ?  Eh bien!  C’est seulement à la fin du livre que vous découvrirez le lourd secret de l’ermite et en attendant vous êtes invités à partager un festin champêtre en compagnie de Claire, sa famille, ses amis et son très loufoque auteur de biographie.

 

Un petit conseil !  Gardez quand même l’œil sur votre barbecue, il pourrait bien brûler pendant votre lecture !

 

Refuge à Chappaquiddick

Par Steven Raichlen

288 pages

Les éditions de l’Homme

699